Voyager sur un grand navire pour se rendre en Sicile est avant tout un moyen "d'entrer dans le voyage". Une sorte d'espace intemporel, un sas entre le monde du bruit, de la vitesse, de l'instantané et celui de la lenteur, de l'inconnu et même de l'introspection. On a pas le choix. Le bateau file 17 noeuds sur une mer d'huile avec la prochaine terre à 405 miles marins, pas question de fuir au milieu de la mer Tyrrhénienne.
Prisonnier du temps, il me reste à penser pendant près de 22 heures. Penser et regarder.
La monotonie de la mer, vide de tout signe humain. Les espaces déserts du navire, les errements des passagers qui s'ennuient, les attitudes de ceux qui fuient dans le sommeil, ceux qui promènent leurs animaux. 
Et le monstre flottant avec ses décors clinquants, déguisement de beau bateau de croisière cachant mal la tôle qui rouille, les coursives qui craquent, les ponts qui vibrent et gémissent au gré des changements de rythme du moteur dont les fumées épaisses balayent le pont arrière.

Globes Art Déco pour les lampadaires de pont.

Les piscines sont vides, recouvertes par des filets qui commencent à se détendre.

Baies vitrées sur la mer depuis les coursives intérieures.

Une porte close au bout du pont "Sky"

Le long couloir du self.

Le pont arrière après la toilette du matin.

Tous les Titanic ont un Grand escalier.

L'ascenseur du pont 6 au pont 9 "Sky" 

Sauve qui pourrait...

Les chambres des chats et des chiens.

La vie à bord est rythmée par les besoins primaires de tout être humain : dormir et manger. Et ceux-là subissent une distorsion de leur temps qui n'a rien à voir avec les principes de la Relativité décrits par A. Einstein. Le temps est distordu dès le départ et tout ce qui le contient l'est aussi. La salle de sommeil est donc jonchée de corps endormis les 3/4 du temps malgré les télévisions qui fonctionnent en permanence, les ronfleurs et pique-niqueurs. Le self et le bar attenant sont pleins le reste du temps.
Restent quelques recoins où s'isoler pour peu que l'on vive à contretemps des autres.

Trouver le confort des sièges Pullman.

ou préférer les couloirs...

Attendre pour débarquer

Attendre pour le petit déjeuner

Un Jacuzzi "design"

L'extérieur se résume à un pont supérieur qui entoure les cheminées du bateau et un petit pont arrière balayé par ses fumées et le vent apparent de près de 40 km/h. C'est pas très accueillant et donc... désert la plupart du temps. Mais le pont permet quand même une sorte de "respiration" et surtout la promenade des animaux de compagnie.

Paysage marin

Refuge du hamac

Un banc de brume ajoute à l'irréel.

Les espaces vident ont leur escalier qui mène nulle part.

Piscine et Jacuzzi extérieurs

En attendant le lever du soleil
En attendant le lever du soleil

Autoportrait au lever du jour

Dans le sillage du temps.

Entre l'aller et le retour depuis Gênes jusqu'à Palerme, il faut compter près de 44 heures de navigation. En ajoutant les manoeuvres d'embarquement et de débarquement qui durent chacune en moyenne 2 heures, on atteint un total de 52 heures de voyage pour 1500 kms de distance parcourue. J'ai donc eu tout le temps de récolter ces images sur les deux navires de la GNV qui opèrent entre la capitale de la Ligurie et celle de Sicile. 
Je voulais prendre la mesure du temps qui passe. 
Si la montre suffit à le compter précisément et nous en donner un résultat instantané, aucun moyen de mesure nous permet de ressentir le passage lent du temps... Ressentir l'ennui, s'en accommoder en cherchant des moyens de s'échapper du "tourner en rond", c'est pas facile quand on ne dispose pas d'un stock de mots fléchés et trois romans dans sa valise. L'appareil photo reste donc un bon moyen de sentir les effets du temps qui passe tout en restant attentif à l'instant, celui qui surgit parfois devant l'objectif, au détour d'un pont ou d'un salon Pullman.
Mer Tyrrhénienne. Septembre 2023.

Attendre avant le débarquement.

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